Guerre de civilisation & islam

Après avoir rappelé que le suspect arrêté après l’attentat était fiché pour radicalisation islamiste et concerné par des troubles psychiatriques, Gérard Darmanin a déclaré : "Il y a manifestement eu un ratage, non pas dans le suivi des services de renseignement, mais un ratage psychiatrique".
Ces mots suscitent colère et incompréhension. Un psychiatre déplore "un jugement à l’emporte-pièce pour trouver des boucs émissaires, alors que nous n’avons pas encore une analyse complète de la situation". Un autre ajoute que "la radicalisation n’est pas un symptôme que l’on peut soigner, c’est une problématique sociétal". Et un troisième note : "Qu’est-ce qui a prévalu, l’idéologie jihadiste ou la pathologie mentale, qui a aussi pu être redéclenchée ou aggravée à la lueur des événements du Moyen-Orient ?"

https://www.huffingtonpost.fr/faits-divers/article/apres-l-attaque-au-couteau-a-paris-les-psychiatres-ne-veulent-pas-etre-les-boucs-emissaires_226606.html

Alors que le préfet des Alpes-Maritimes avait une nouvelle fois décidé d'interdire deux rassemblements en soutien à la cause palestinienne, décision relayée dans un tweet précisant que le rassemblement est interdit "en raison des risques de troubles à l’ordre public, d’affrontements, de la persistance de la menace terroriste et de la recrudescence d’actes antisémite".
Seulement voilà... Un jugement du tribunal administratif de Nice a à nouveau suspendu l’arrêté pris, en précisant que les précédents rassemblements organisés par le collectif "pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens", l'un des deux organisateurs de la marche de ce dimanche – s'étaient déroulés "sans aucun débordement".

https://www.marianne.net/societe/manifestation-pour-gaza-a-nice-la-justice-suspend-l-interdiction-la-prefecture-oublie-de-retirer-son-tweet

Plus de deux mois après l’attaque du Hamas, des discours de réfutation, ou de minimisation, des crimes du groupe terroriste prospèrent. Ce déni ne résiste pas aux nombreuses prises de vue qui témoignent du massacre, et sur lesquelles CheckNews a décidé de revenir.
On ne peut limiter les horreurs du 7 octobre aux seuls crimes qui ont été filmés. Certaines exactions n’ont pas été enregistrées. Il reste les corps, des témoignages. Mais à défaut de tout raconter, les images qui existent, innombrables et insoutenables, suffisent amplement à anéantir le discours de réfutation, ou de relativisation de ces crimes, qui prospèrent sur les réseaux sociaux, comme nous le décrivons dans un autre article. Reprenant la rhétorique du Hamas, des commentateurs décrivent les 1 200 victimes, dont 800 civils, comme des "dégâts collatéraux" que le mouvement islamiste n’aurait pas ciblé volontairement. D’autres suggèrent que les victimes auraient surtout été le fait de tirs israéliens. "Où sont les images ?" osent demander certains.

https://www.liberation.fr/checknews/guerre-hamas-israel-les-negationnistes-du-7-octobre-face-aux-preuves-videos-20231220_533NESFIGJHMZOIB3KCZR6MPG4/

Le Crif publie un rapport choc sur la hausse drastique des actes antisémites en France depuis le 7 octobre. D’après ses chiffres, le nombre d'actes antisémites dans le pays a augmenté de manière exponentielle depuis les attaques du Hamas contre Israël. Le Crif s’est appuyé sur les données du ministère de l’Intérieur et du Service de Protection de la communauté Juive pour faire ses calculs. Entre octobre et décembre, 1242 actes antisémites ont été recensés, c’est-à-dire autant que sur les trois années précédentes cumulées. Soit une "explosion" de 1000 % depuis le 7 octobre. D’une quarantaine chaque mois sur la période estivale, les actes antisémites sont passés à 563 en octobre, 504 en novembre et 175 en décembre. La décrue observée en fin d’année reste "difficile à analyser", souligne le rapport.

https://www.huffingtonpost.fr/france/article/depuis-la-guerre-israel-hamas-les-actes-antisemites-ont-explose-selon-le-crif_228849.html

“Djihadisme d’atmosphère” : Gilles Kepel, un expert de l’islam controversé.
Sous son influence, ce concept imprègne les débats sur l’islam. Gilles Kepel fraye aujourd’hui avec les médias d’extrême droite et se dit chassé par les “wokistes” de l’université. Qu’est-il arrivé au brillant politologue ?

https://www.telerama.fr/debats-reportages/djihadisme-d-atmosphere-gilles-kepel-un-expert-de-l-islam-controverse-7019914.php

Sur la déculturation (islamique, religieuse, mais aussi globale) :
"Partout dans le monde, on a une déculturation du religieux. Le fondamentalisme est une déculturation du religieux. Les salafistes comme les évangélistes ne veulent pas entendre parler de culture : pour eux, la culture est païenne, donc ce sont des gens qui luttent contre leur propre culture. Il y a des marqueurs religieux qui se baladent complètement en dehors de leur lecture d'origine, et qui vont se poser ça et là. D'où une dimension nihiliste. Et ça marche parce que la globalisation marche. La déculturation est à tous les niveaux. Par exemple, le mode de consommation : le fait que McDonald et IKEA apparaissent partout, c'est qu'on a un rapport à la consommation identique presque partout. On a une crise des cultures traditionnelles qui sont remplacés par des codes simplistes (smileys, j'aime j'aime pas etc). Et le nouveau religieux s'articule sur ses modes : Jésus est mon sauveur, Allah point final, etc. C'est quasiment plus que des slogans maintenant".

Sur l'occident et le religieux :
"On ne comprend plus le religieux surtout en France. Tout porte sur la visibilité du religieux, le voile, la soutane etc. Quand on voit du religieux on trouve ça bizarre. On a une déculturation de la laïcité : la laïcité ne reconnaît plus le religieux, elle ne sait plus ce que c'est. Donc elle le voit sous la forme du fanatisme. Vous demandez aux gens c'est quoi la laïcité, ils répondent que c'est que le religieux doit s'exercer dans la sphère privée. Mais la loi de 1905 porte sur les cultes, et par définition, les cultes c'est public. La loi de 1905 n'exclut pas le religieux de l'espace public, elle l'organise sous le contrôle de l'État.
On ne comprend plus la croyance aujourd'hui. Si les gens se disent croyants, ils sont regardés comme si c'était une espèce de maladie. La normalité du religieux a disparu. Aujourd'hui on veut exclure les religieux de l'espace public, on ne voit que le fondamentalisme. Mais le religieux c'est autre chose.
On est incapable de penser la religion autrement qu'en terme d'aliénation ou en terme d'identité, particulièrement à gauche. L'aliénation, c'est de dire que les gens qui parlent de leur foi ne savent pas ce qu'ils disent et donc qu'il ne faut pas les écouter. Qu'une fille qui porte le foulard ne doit rien dire sur le fait de porter du foulard, parce que ce n'est plus sa parole à elle. Il n'y a pas que pour les filles voilées, il y a aussi pour les prostituées. On a une catégorie de personnes qui ont un discours qui n'est pas considéré comme un discours d'émancipation, et donc qu'on écoute plus. C'est très grave dans une démocratie de ne pas écouter les individus. Et l'autre dimension c'est l'identité : il y a une espèce d'accord pour dire partout que le religieux c'est de l'identitaire. Ça peut être vrai dans certains cas, mais l'identité tue le religieux. Dans un pays comme le Liban, vous avez forcément une religion sur votre carte d'identité : vous êtes maronite, sunnite ou chiite, mais vous pouvez être marxiste athée...".

Sur l'émancipation de la femme :
"Aujourd'hui, on voit de plus en plus l'affirmation du religieux être prise en main par des femmes. C'est un paradoxe, vous avez une demande d'émancipation de la femme à l'intérieur de religions qui n'ont pas prévu l'émancipation de la femme. Mais c'est pas à nous de juger. C'est pas à nous d'imposer de l'extérieur un modèle de ce qu'est l'émancipation, parce que là on est plus démocrate. Et l'on voit aujourd'hui une laïcité qui se retourne contre la démocratie, et ça c'est très grave".

Sur l'occident et l'islam :
"Le problème avec les spécialistes de l'islam en occident, c'est qu'ils se sont basés sur une idée qu'il y avait un monde islamique, un logiciel coranique qui serait implanté dans la tête de tout musulman. Beaucoup d'islamologues ont une vision théologique de la religion : la religion serait un ensemble de normes. Ils disent ce que serait la vérité du religieux. Ce qu'ils ne comprennent pas, c'est que les croyants ils s'en fichent de la théologie. Ils se demandent pas en se levant ce que la religion leur dit de faire. Les gens vivent la foi comme une culture personnelle, une expérience de la vie. On le voit bien quand la religion est incarnée dans une société.
La vie de paroisse, c'est pas du bourrage de crâne. C'est pas un curé qui du matin au soir, vous explique ce que vous de devez faire. Le curé, c'est aussi un personnage réel dont les gens connaissent parfaitement les faiblesses. Le christianisme, c'est une gestion de ce qu'on appelle la vie ordinaire (les péchés etc). Tout est en fait compliqué et c'est ça qui fait ça marche. Mais ça ne marche plus quand ça se transforme un système de normes. Celui qui n'est pas croyant, voit la religion comme un système de normes, alors que la religion c'est une expérience personnelle, c'est autre chose.
Moi mon expérience en Afghanistan, c'est que les gens discutent : on a pas en face de nous une une mentalité, une culture qui refuse de faire des concessions à l'occidentalisation. On a des gens qui ont un répertoire de croyances, de protections d'eux-même, qui ont des habitudes aussi, mais qui sont prêts à discuter des décisions qu'ils ont prises, des choix qu'ils ont fait, et éventuellement les remettre en cause. Ça bouge dans les sociétés musulmanes mais on ne le voit pas : on pense que le musulman est fixe alors que l'occidental lui, change, a droit à ce qu'on appelle un parcours de vie."

Le départ en sourdine des musulmans de France

Cela fait des années que la France perd des professionnels hautement qualifiés partis chercher plus de dynamisme et d'opportunités ailleurs. Parmi eux, un nombre croissant de Français musulmans qui affirment que la discrimination a été un puissant facteur de leur départ et qu’ils se sont sentis contraints de quitter la France en raison d’un plafond de verre de préjugés, d’un questionnement persistant au sujet de leur sécurité et d’un sentiment de non-appartenance. Les Français musulmans, 10 % de la population selon les estimations, occupent une place disproportionnée dans les campagnes politiques. C’est une indication non seulement du profond traumatisme infligé par les attentats de 2015 et 2016, qui ont fait des centaines de victimes, mais aussi d’années de débats en France autour des questions identitaires et de ses rapports non résolus avec ses anciennes colonies.

Ils sont associés à la criminalité ou à d’autres fléaux sociaux par le biais d’expressions-choc telles que "les zones de non-droit". Ceux qui l’observent depuis l’étranger évoquent avec colère et résignation leur pays d’origine où il leur reste de la famille et des liens forts. Certains déclarent que c’est hors de France que, pour la première fois, le simple fait qu’ils soient français n’est pas remis en question. "Il n’y a qu’à l’étranger que je suis français", dit Amar Mekrous, qui a grandi en banlieue parisienne : "dans mon pays, je ne suis pas français".

Rama Yade, secrétaire d’État chargée des droits humains sous la présidence de Nicolas Sarkozy, estime que le déni par la France de problèmes comme les violences policières n’a fait qu’aggraver les choses. À ses yeux, la fronde actuelle contre le “wokisme” en France n’est “rien d’autre qu’un prétexte pour ne plus s’attaquer aux discriminations". Née au Sénégal dans une famille musulmane, elle voulait croire que sa nomination au poste de secrétaire d’État en 2007 serait “le point de départ". Mais après une candidature malheureuse à l’élection présidentielle de 2017, elle est partie pour les États-Unis. Pour elle, l’accent que met la campagne présidentielle sur l’immigration est “la consécration de 20 ans de pourrissement” d’une culture politique obsédée par l’identité nationale. Elle a quitté son parti politique car il est, dit-elle, devenu “très hostile à tout ce qui ne représentait pas une version fantasmée de l’identité française”.

https://www.nytimes.com/fr/2022/02/13/world/europe/musulmans-france-exil-discrimination.html

Ce qui ressort beaucoup des témoignages présents dans le livre, c’est que ces techniciens, cadres, ingénieurs ou médecins peuvent véritablement prendre l’ascenseur social uniquement une fois partis à l’étranger. Ils y trouvent aussi le “droit à l’indifférence qui leur permet de se sentir simplement Français", écrivent encore les auteurs. Libération illustre ce dernier point via le témoignage de Salim, un trentenaire qui prend en exemple son cousin vivant à Londres : "personne ne lui fait de réflexions pendant le ramadan ou après une attaque terroriste. Il n’est pas vu comme un arabe ou un musulman mais comme un ingénieur français". Cette atmosphère de rejet s’est "accentuée depuis les attentats de 2015 pour beaucoup de sondés", note Julien Talpin. Et s'est encore amplifié depuis l’attaque du Hamas du 7 octobre en Israël.

https://www.huffingtonpost.fr/culture/article/la-france-tu-l-aimes-mais-tu-la-quittes-ce-qu-il-faut-savoir-sur-ce-livre-sur-l-islamophobie_233204.html

Quel est le profil des personnes ayant répondu aux questionnaires ?
Il y a plusieurs types de profils, mais des éléments reviennent majoritairement. Il y a une surreprésentation des diplômés : la moitié ont un bac +5. C’est tout à fait atypique par rapport à la population musulmane française. Partir à l’étranger permet de se prémunir des discriminations vécues, mais aussi de prémunir ses enfants, pour ne pas les confronter aux expériences qu’on a pu faire. Enfin, même si la majorité est née en France, il y a un certain nombre de binationaux.

Les raisons du départ sont multiples, mais le racisme et l’islamophobie reviennent de manière omniprésente...
Absolument. La première raison du départ est de mettre à distance le racisme et les discriminations. La deuxième est de pouvoir vivre sa religion librement, puis la troisième, de progresser professionnellement. Ces stigmatisations, micro-agressions, discriminations, rappellent en permanence aux musulmans qu’ils ne sont pas des Français comme les autres. Une fois à l’étranger, les personnes disent qu’elles ne sont jamais senties aussi françaises, puisqu’elles sont enfin perçues comme telles.

Vous rappelez les conséquences du racisme et de l’islamophobie sur la vie des musulmans...
L’enjeu de ce livre est de pouvoir restituer la violence ordinaire que c’est d’être musulman en France. Il y a l’idée d’une sorte "d’islamophobie d’atmosphère". La surfocalisation sur l’islam dans le débat politique, les médias et les réseaux sociaux, a quelque chose d’oppressant pour les musulmans. L’impression d’être constamment scruté provoque une sur-attention à ce que l’on fait, ce que l’on dit. Ce qui revient dans les entretiens, c’est que la pression retombe à l’étranger.

Malgré cette prise de distance, beaucoup continuent d’entretenir des liens familiaux et affectifs avec la France.
Ils continuent à entretenir des liens professionnels et affectifs avec la France. Ils se disent redevables de l’école publique à laquelle ils ont pu accéder. Le discours qui revient est celui d’une sorte d’amertume, d’un sentiment de gâchis. D’un côté, la France a investi en eux, leur a permis d’obtenir des diplômes, de les élever culturellement et socialement. Puis une fois sortis de l’université ou des grandes écoles, elle ne leur permet pas d’avoir des emplois équivalents à leurs compétences.

Il y a t-il des destinations préférées à d’autres ?
Les trois premières destinations sont : Royaume-Uni, Canada et États-Unis ; les Émirats-Arabes-Unis ; les pays du Maghreb. Les destinations lointaines, le Canada, les États-Unis et les Émirats arabes unis, concernent les personnes les plus diplômées. Partir en Angleterre est moins engageant que de partir à 10 000 km de la France. Les pays du Maghreb sont choisis souvent pour des liens familiaux. On y retrouve des personnes moins diplômées.

Pour ces personnes, la préoccupation principale est-elle plus de vivre librement sa religion ?
Le facteur religieux n’est pas central dans les raisons du départ. La religion est importante dans les facettes de ces personnes, mais elles ne souhaitent pas partir en pays musulman. Elles souhaitent au fond, et cela ressort majoritairement dans les entretiens, pouvoir concilier leur foi avec leur carrière professionnelle. Ce qu’elles ont du mal à faire en France.

Après être partis, beaucoup disent enfin "respirer". Qu’est-ce que ça dit du climat ambiant français ?
Ça dit à quel point il est étouffant. Ce n’est pas anecdotique. On pourrait se dire : "ce ne sont que les médias, les réseaux sociaux ou Cnews, ce n’est pas la France", mais cette ambiance a des incidences réelles sur la vie des musulmans. Elle autorise certains à faire des remarques, elle crée un sentiment d’oppression, d’usure, de fatigue. Ce serait une erreur de penser que cette surfocalisation du débat public sur l’islam en France ne serait qu’une partie superficielle et que la vraie France serait ailleurs. Ces constructions médiatiques et symboliques ont des incidences sur la vie des musulmans et sur la place qu’on ne veut pas octroyer à l’islam, comme une religion désormais française.

Plusieurs refusent de se définir comme expatrié. L'une utilise même l’expression de "réfugié de la laïcité".
Effectivement, le terme d’expatrié renvoie dans l’imaginaire à une expérience coloniale. Par ailleurs, il y a l’idée que l’expatriation serait un choix. Dans le cas des personnes rencontrées, c’est un regret, un choix contraint par le contexte politique, l’ambiance et l’atmosphère médiatique, mais aussi par le cadre juridique. Derrière l'expression de "réfugié de la laïcité", il y a l’idée de politique. Face à cette persécution ressentie, il y a un besoin de prendre ses distances.

Au-delà d’une "fuite des cerveaux", que constituent ces départs massifs vers l’étranger ?
Ce n’est pas seulement une fuite des élites économiques. C’est aussi un problème civique et politique. Des porte-voix des musulmans s’en vont. Il n’est pas possible de perdre de vue cet aspect de perte d’élite professionnelle, mais le problème est bien plus profond. La société française perd un regard, une perspective, une diversité, qui est un atout.

L’enquête donne à voir une infime partie du problème. Combien de Français seraient concernés ?
Plus de mille personnes ont répondu au questionnaire. On est loin d’avoir touché tout le monde. Certaines régions nous ont échappé, la Turquie et l’Afrique Subsaharienne notamment. Le spectre est donc bien plus large. C’est dur d’évaluer le poids réel du phénomène, mais ça concerne plusieurs milliers ou dizaines de milliers de personnes.

Vous parlez d’une "exception hexagonale" en termes d’islamophobie. Pourquoi ?
Il y a des formes de tolérances religieuses plus importantes dans certains territoires d’Outre mers. Certains musulmans sont partis à La Réunion, car ils savaient que le contexte multiculturaliste était assez différent. En France, on s’est focalisé sur ce terme d’islamophobie, qui a été beaucoup disqualifié. C’est un terme pourtant reconnu à l’international, chez les chercheurs et dans les organisations internationales. Ne pas avoir un terme sur lequel on s’entend, permet de ne pas qualifier le phénomène. L’enjeu, au-delà du terme, est de prendre la mesure de ces violences ordinaires, de ces vies brisées et du sentiment que pour devoir s’en sortir, les gens doivent partir. Ça devrait interpeller la société française et les pouvoirs publics. C’est un des objectifs du livre, mettre cette question à l’agenda.

La France est-elle capable d’avoir ce débat actuellement ?
Dans beaucoup d’entretiens revient le sentiment d’une dégradation de la situation sur ces questions ces dernières années, d’une montée en puissance de l’extrême-droite qui rend cela plus compliqué, d’une forme d’hystérisation du débat public. Il n’est pas certain qu’à court-terme, on avance. On va voir comment la réception du livre va permettre d’avoir des débats apaisés.

Qu’est-ce-que vous a le plus marqué au cours de ces mois d’enquête ?
À quel point les gens avaient envie d’en parler. Souvent, dans les enquêtes sur les questions sensibles, le racisme ou les discriminations, ce n’est pas facile d’aborder ces questions. Là, les gens acceptaient très spontanément de répondre, ils faisaient circuler le questionnaire ou nous mettaient en contact avec d’autres personnes. Pour eux, il y avait un enjeu à témoigner. À leurs yeux, le sujet mérite un débat public. C’est rare une telle appétence pour participer à une enquête de sciences sociales ; ça en dit long sur ce phénomène.

https://www.bondyblog.fr/opinions/interview/depart-de-francais-musulmans-cest-un-choix-contraint-par-le-contexte-politique-et-latmosphere-mediatique/

"Les accusations d’antisémitisme, manipulables par les macronistes et une bonne partie des forces politiques en France dans le but d’empêcher la contestation légitime de la politique d'Israël, doivent être considérées avec vigilance".

https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/05/03/israel-gaza-une-contestation-legitime-des-derives-inacceptables_6231324_3232.html